Haro, haro sur Frédérique Vidal ! Haro aussi sur Jean-Michel Blanquer qui, fidèle à ses prises de position antérieures, la soutient !
On assiste à un lynchage en règle de la Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, “recadrée” par le CNRS et les Présidents d’Université, désavouée par l’Elysée.
Que l’université et les étudiants soient en grande souffrance, comme la société tout entière, c’est un fait. Que des critiques puissent être formulées sur la gestion de la crise par la Ministre est possible.
Mais ce n’est pas là-dessus que Madame Vidal est si violemment attaquée .
Non, c’est cette phrase, au demeurant très mesurée envers l’université, qui a déclenché un déchaînement de réactions hostiles et la réclamation de sa démission :
” l’islamo-gauchisme gangrène la société dans son ensemble et l’université n’est pas imperméable”
Alors, islamo- gauchisme, mal imaginaire ou réel ?
Le terme doit certainement être explicité :
1 Une offensive islamiste multiforme a été déclenchée, notamment contre la France, par les menaces et les attaques terroristes meurtrières comme par un entrisme soft et efficace pour faire advenir un changement sociétal.
2 Les courants dits d’extrême gauche font preuve d’une complaisance envers elle qui va souvent jusqu’au soutien, se comportant en alliés objectifs.
Rien de vraiment nouveau sous le soleil.
En 1979 le parti communiste iranien Toudeh s’est allié à l’ayatollah Khomeini. Un peu comme le puissant parti communiste allemand avait cru en son temps “Après Hitler ce sera nous”.
La gauche française n’avait du reste presque rien compris à l’avènement de la République islamique, impressionnée par son anti- impérialisme-américain.
En Grande-Bretagne le Socialist Workers Party, qui se réclame encore du marxisme, prône l’alliance avec les islamistes. Oubliée la religion opium du peuple, le groupe se mobilise contre “l’islamophobie” et fustige la France laïque. Quelques années plus tard, son lointain cousin français, le NPA l’a rejoint.
La collusion entre islamistes et gauchistes, se cristallise aussi autour de la “cause palestinienne,” les seconds faisant mine de ne pas entendre les “Morts aux Juifs” et les “Allah Akbar” lancés dans les cortèges.
A vrai dire, ce compromis historique funeste ne se limite pas aux seuls courants d’extrême gauche. Des ONG qui se réclament des droits humains suivent la même voie.
En 2005 l’ONG International Crisis Group publie un rapport dans lequel elle distingue trois sortes d’islamisme : missionnaire , politique et djihadiste. Ses préconisations sont claires : s’appuyer sur les deux premiers pour contenir le troisième, le seul dangereux à ses yeux. Amnesty International lui emboîte le pas et ne ménage pas ses critiques contre la France sur la question du voile islamique.
Et dans l’Education Nationale ?
Dans son rapport de 2004 ,Jean-Pierre Obin tira en vain la sonnette d’alarme.
Le “pas de vagues” a prévalu et la pénétration islamiste a contraint de plus en plus d’enseignants à l’autocensure.
Il y a un an la lycéenne Mila harcelée et menacée de mort a été exfiltrée de son lycée. Ses harceleurs ont pu y rester.
En octobre dernier, la décapitation de Samuel Paty, directement liée à l’exercice de sa liberté pédagogique et au contenu de son cours, a été un horrifiant point de bascule.
Depuis on ne compte plus les menaces et pressions exercées sur des professeurs.
A présent, ce ne sont plus les seules écoles juives qui doivent être protégées, ce sont les écoles de la République.
Qu’en est-il plus spécifiquement à l’université ?
Au fil des années, les incidents se multiplient.
Deux exemples parmi des dizaines d’autres : Samuel Mayol, Directeur de l’IUT de Saint-Denis est menacé ; accusée de stigmatiser les Musulmans, une formation de “prévention de la radicalisation” avec Mohamed Sifaoui est suspendue à Paris I – Panthéon Sorbonne.
La collusion entre gauchistes et islamistes fonctionne à plein régime, symbolisée par le voile islamique arboré par la vice-Présidente de l’UNEF. Le syndicat Solidaires étudiant exige l’annulation de la lecture du texte posthume de Charb, Lettre aux escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des racistes, à Paris Diderot !
Intersectionnalité oblige, on accepte l’organisation de stages réservés aux “racisés” et on fait annuler une représentation des Suppliantes d’Eschyle sous un prétexte absurde.
S’opposer au mouvement c’est s’exposer à des intimidations voire des répercussions sur sa carrière.
A Limoges, un sociologue est écarté de son laboratoire après s’être opposé à la venue d’Houria Bouteldja, fondatrice du PIR, Parti des indigènes de la République. ( Elle avait quand même écrit “Mohamed Merah c’est moi” !)
La philosophe Monique Canto -Sperber explique :
“C’est un rapport de force. On ne gagne que si on résiste. Mais il faut savoir ce que signifie avoir contre soi cette mouvance très puissante. Cela a un coût social, cela peut détruire votre image.”
C’est justement pour résister dans ce contexte difficile que des universitaires ont créé en 2016 le Collectif Vigilance universités, ” Réseau universitaire de veille contre le racisme et l’antisémitisme, contre le racialisme et le communautarisme, et pour la défense de la laïcité”.
Après l’assassinat de Samuel Paty s’est constitué sur le même modèle le réseau Vigilance Collèges Lycées.
Proposer, comme l’a fait Frédérique Vidal d’établir un “bilan de l’ensemble des recherches”, visant à discerner ” ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme et de l’opinion” n’a donc rien de scandaleux.
Le paradoxe est de voir la Ministre accusée d’atteinte à la liberté académique alors que c’est précisément l’intolérance et les atteintes à la liberté académique qui ont fini par attirer son attention.
Le déni si bien ou plutôt si tristement illustré par les propos du Président de l’Université Paris Sorbonne ne doit plus faire illusion:
“Qu’est-ce qui gangrène la société ? C’est la discrimination, c’est la ghettoïsation, c’est l’inégalité sociale dans l’accès au travail, dans l’accès à l’éducation, à la culture, et l’échec des politiques publiques dans ce domaine depuis cinquante ans.”
Soit, mais encore ? Rien d’autre !
Terrorisme islamiste ? Pressions sur enseignants et élèves ? Professeur décapité ? Non vraiment, il ne voit pas. On doit supposer qu’il n’était pas présent lors de l’hommage national à Samuel Paty dans la Cour de la Sorbonne.
On a du mal à comprendre : en 2019 il avait fait annuler au dernier moment un colloque sur le terrorisme organisé par le CAT, Centre d’Analyse du Terrorisme, qui devait se tenir à Jussieu car l’événement était “trop dangereux” pour avoir lieu dans une enceinte universitaire.
Danger ? Mais quel danger Monsieur le Président ?
Huguette Chomski Magnis
Secrétaire générale du MPCT