De Jean-Pierre Lledo, cinéaste né Algérien, nous connaissions les remarquables documentaires sur l’Algérie, qu’il avait du fuir en 1993 sous la menace islamiste : Algérie mes fantômes puis Algérie, histoires à ne pas dire, avec notamment la participation du jeune et talentueux metteur en scène Kheïreddine Lardjam.
Celui-ci montait Les Justes de Camus en même temps qu’il tentait de secouer l’histoire officielle algérienne et de briser le silence sur le massacre d’Oran en 1962.
Jean-Pierre Lledo nous livre à présent sa découverte d’Israël, le pays qui lui était interdit, qu’il s’était lui-même si longtemps interdit.
Cela donne une oeuvre à nulle autre pareille, aussi singulière que l’est son propre parcours.
Israël, le voyage interdit est divisé en quatre parties. La première partie “Kippour” présentée en avant-première au Forum des Images en janvier dernier l’a été à nouveau hier et les autres parties suivront, à Paris, en banlieue puis en région.
Il part à la rencontre de sa famille maternelle, à la recherche du temps perdu, il renoue miraculeusement des liens distendus par l’idéologie plus que par le temps et la distance. Lledo filme à merveille des personnages à la fois simples et extraordinaires qu’il laisse s’exprimer librement, sur leurs joies et leurs blessures liées au terrorisme passé et présent. Il y a toujours une profonde humanité et de vrais moments de grâce, émouvants ou drôles.
Inextricablement liée aux retrouvailles familiales, l’exploration du pays Israël est un voyage initiatique dans lequel l’accompagne sa fille Naouel. Ces deux Candides questionnent, avec une extrême finesse, interrogeant sans tabou ni préjugé le passé et le présent, l’histoire et le rôle de la religion juive dont les fêtes traditionnelles rythment le récit.
Sur leur sentier, pour tenter de comprendre sionisme et judaïsme, ils ont des guides intelligents, sensibles et experts en complexité, à commencer par Ziva Postec, productrice et monteuse du film.
Ne vous interdisez pas ce voyage, partagez le. Munissez-vous de masques et allez-y.
La première partie , la moins longue, fait déjà 2h 20 mais on ne voit pas le temps passer.
Marlène Jason
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