Débat : Alain Gresh et le terrorisme

{{Cet article a été publié le 1° août 2011 par le site La Règle du Jeu.}} [ http://laregledujeu.org/2011/08/01/6875/alain-gresh-et-le%c2%a0terrorisme/->http://laregledujeu.org/2011/08/01/6875/alain-gresh-et-le%c2%a0terrorisme/]-Dans un article de son blog du Monde Diplomatique (1), Alain Gresh prend la responsabilité de parler “d’imposture” à propos du 7° Congrès International des Victimes du Terrorisme qui se tiendra prochainement à Paris, signant un article assez emblématique de l’idéologie qui a entravé jusqu’ici la résistance de la société civile au terrorisme. Celui-ci est pourtant bien un problème planétaire. Qu’on en juge par ces bilans terribles qui ne retiennent pas l’attention de Monsieur Gresh : d’avril à juin 2011, 1865 civils ont été tués dans le monde, délibérément visés par des actes terroristes et 3954 civils ont été blessés. La grande majorité de ces victimes sont musulmanes et la très grande majorité des attentats ont été commis par des islamistes. Le déni de cette double réalité et justification des actes terroristes sont porteurs du développement mortifère du terrorisme. La mansuétude envers les auteurs et commanditaires de tels actes suscite de nouvelles vocations, les attentats d’Oslo en sont l’illustration tragique. -Tout comme Alain Gresh, l’ONU a des difficultés à admettre une définition universelle du terrorisme. En vain le Comité Ad-Hoc mis en place en 1996 se réunit-il chaque année. Sa quinzième session en avril dernier à New York a échoué comme les précédentes. Non que la tâche soit difficile. Les choses sont fort simples au contraire : il s’agit de condamner de façon universelle et inconditionnelle tous les actes terroristes qui visent délibérément des civils, en particulier le recours aux attentats dits “suicides”. Pourquoi alors cette incapacité de l’ONU ? Parce que l’Organisation de la Conférence Islamique (57 pays) exige d’établir la distinction de principe entre le terrorisme et le combat pour l’auto-détermination des peuples sous occupation étrangère et domination coloniale. Toute définition objective basée sur la nature des actes commis est donc rejetée au profit d’une définition subjective entachée de choix idéologiques. Dans cette approche relativiste, les mêmes actes objectifs (attentats visant des civils) seront donc qualifiés, selon leur contexte, d’actes terroristes ou bien d’actes de résistance. C’est là une défaillance majeure face au terrorisme, à l’image de l’impuissance générale de l’ONU et dans laquelle des experts et des spécialistes comme Alain Gresh ont une grande part de responsabilité. -Comment Monsieur Gresh ose-t-il nous resservir l’argument éculé des nazis qui qualifiaient de terroristes la Résistance française ? Comparaison insultante si l’on s’en tient aux seuls faits ! Les Résistants français en lutte contre l’occupant nazi ont-il jamais envoyé des gens faire sauter des foules de femmes et d’enfants ? Les nazis et leurs collaborateurs nommaient les résistants terroristes.Ahmadinejad, Bachar El Assad et Kadhafi, trois grands pourvoyeurs de terrorisme et parrains d’organisations terroristes traitent eux aussi de terroristes leurs opposants qu’ils mitraillent, bombardent et exécutent. A nous de savoir séparer la paille des mots du grain des choses ! A nous de refuser d’opposer les victimes entre elles. Victimes de génocide et victimes d’actes terroristes ont également droit à la reconnaissance et à la justice. -Aujourd’hui, la justice internationale peut poursuivre des dirigeants et individus accusés de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide. Les faire comparaître est une autre affaire comme on le voit avec El Beshir, le toujours Président du Soudan. Mais les crimes de terrorisme sont, eux, exclus du champ de compétence de la Cour Pénale Internationale. Ceci garantit aux commanditaires d’attentats, “suicides” ou autres, une impunité dont Monsieur Gresh semble fort bien s’accommoder. Faudrait-il pour lui complaire bâillonner les victimes du terrorisme ou les trier selon leur nationalité et la justesse réelle ou supposée de la cause au nom de laquelle elles ont été frappées ? Faut-il le laisser bouter hors de l’humanité celles qui n’ont pas à ses yeux la bonne nationalité ou la bonne histoire, quelle que soit l’horreur du crime subi ? Ne faut-il pas au contraire balayer ces obstacles idéologiques et tout faire pour débarrasser le monde d’un insidieux soutien moral au terrorisme, en réaffirmant que les valeurs universelles s’imposent à tous ? Un combat qui ne peut ni ne doit reposer sur les seules épaules des victimes du terrorisme mais qui concerne toute la société civile, tout entière cible potentielle. Cela suppose d’accepter d’entendre sans censure la parole spécifique des victimes du terrorisme mais aussi de ne pas les isoler. (1)[ http://blog.mondediplo.net/2011-07-16-Un-congres-imposture-sur-le-terrorisme->http://blog.mondediplo.net/2011-07-16-Un-congres-imposture-sur-le-terrorisme] Huguette Chomski Magnis Secrétaire Générale du MPCTCoordinatrice du Collectif Contre le Terrorisme