La France, le monde, la liberté et le terrorisme

Deux éléments de l’actualité récente concernant la France sont d’autant plus graves qu’ils ont été minimisés : les nouvelles menaces proférées contre la France et l’épisode Alliot Marie à Gaza. -{{Les nouvelles menaces contre la France}} Sans savoir s’il sera authentifié ou pas, comment apprécier le message de Ben Laden diffusé vendredi 21 sur Al Jazira ? Certes il n’est pas plus violent que celui du 27 octobre 2010. Pour rappel : {“Si la France est en droit d’interdire aux femmes libres de porter le voile, n’est-il pas de notre droit de pousser au départ vos hommes envahisseurs en leur tranchant la tête ?”.} Mais entre temps deux jeunes otages français aux mains de franchisés Al Qaida ont été tués ! Si ce nouveau message ne revient plus sur l’interdiction de la burka, il lie à nouveau le sort de nos compatriotes otages au retrait des 3750 soldats français d’Afghanistan et confirme une focalisation sur les Français menacés “à l’intérieur et à l’extérieur de la France”. Un chantage que toute la classe politique française doit rejeter en refusant l’irruption, mortifère pour la démocratie, du terrorisme dans le débat. Y est elle prête ? Est-elle plus armée que l’était la classe politique espagnole lorsqu’elle fut confrontée aux attentats de Madrid en mars 2004 ? Au vu des réactions que certains politiques se sont autorisés après la mort des otages du Niger, le front républicain a pour le moins besoin d’être consolidé face au terrorisme : Villepin critique l’emploi systématique de la force pour libérer les otages, Bayrou critique la stratégie française. Quant à l’éditorial de l’Humanité du 10 janvier, il titrait {” Un tabou à lever La politique étrangère de la France est-elle en partie responsable des menaces qui pèsent sur ses intérêts ?”}Or il n’y a pas de bonne réponse au terrorisme et à la prise d’otage en particulier. On doit refuser le piège de la polémique, instrumentalisée de façon indécente de part ou d’autre, sur l’intervention militaire décidée par la France, faute de quoi on laisse les terroristes islamistes marquer des points. -{{L’épisode Alliot Marie à Gaza}} S’il a été minimisé par Madame Aliot Marie elle-même, une Ministre de la République a bel et bien été agressée verbalement et physiquement par des manifestants à Gaza. Le scandale qui avait provoqué l’indignation “spontanée” de ces Gazaouis ? Des propos imputés, à tort, à notre Ministre des Affaires Etrangères qualifiaient, ô blasphème, de “crime de guerre” la longue séquestration de Guilad Shalit ! On chercherait en vain un communiqué de protestation de l’Élysée, de Matignon ou du Ministère des Affaires Etrangères contre l’offense faite à la France. Rien nulle part, c’est un non-événement. Alors pourquoi y attacher de l’importance ? Pour une double raison. D’abord parce que l’on est à nouveau devant la confusion, sciemment entretenue, entre la situation d’un otage et celle d’un prisonnier détenu dans un lieu défini et visitable, accusé qui doit être jugé, innocenté ou condamné puis libéré au terme de sa peine. Ensuite parce que l’absence de réaction dit beaucoup sur le choix politique de préférer la langue de bois au parler vrai et d’accepter l’inacceptable. Le 21 janvier 2011 renvoie irrésistiblement au 26 février 2000. Ce jour-là, Lionel Jospin, Premier Ministre de la France s’était fait caillasser devant l’université palestinienne Bir Zeit, en Cisjordanie, pour avoir eu l’outrecuidance de condamner “les attaques terroristes du Hezbollah”. Loin de protester et de défendre son Premier Ministre, le Président de la République Jacques Chirac avait vertement tancé Lionel Jospin ! Michèle Alliot-Marie se joignit au chœur des protestataires indignés pour fustiger ce “dérapage inconcevable”. Beaucoup de choses se nouèrent sans doute à ce moment-là, de l’ordre de la tolérance face aux organisations terroristes et du renoncement à la liberté de parole. Si 11 ans plus tard, personne ne s’est offusqué de l’incident de Gaza, c’est que la police de la pensée a fait son vilain travail en Europe et dans le monde, creusant le sillon où les terroristes islamistes sèment la mort en toute impunité. On nous a tant asséné qu’il faut comprendre leur “exaspération” et revendiquer sans complexe une indignation sélective que la lâcheté, astucieusement déguisée en courage, peut être applaudie en toute bonne conscience. Oui, mais les peuples réservent des surprises. Le sort des Tunisiens n’avait pas suscité l’indignation de Monsieur Hessel. Cela ne les a pas empêchés de se dresser pour leur liberté en une révolution, magnifique en dépit de son avenir incertain. Voilà qui peut donner de l’espoir aux Tibétains , aux Iraniens, aux Ouïgours, aux Darfouris et à tous les autres peuples oubliés sur le bord de la route de l’indignation chic et choc. Huguette Chomski Magnis 23 janvier 2011