{{[La mort d’Elena Bonner nous conduit à publier l’intégralité de ce message rédigé deux mois après les attentats de Madrid. Sans nécessairement partager toutes les positions alors exprimées par Elena Bonner, nous rendons hommage à une grande combattante de la liberté en lui offrant cette tribune libre posthume.Bien des choses ont changé depuis 2004. Cependant, beaucoup des errements idéologiques dénoncés par Elena Bonner empêchent toujours la condamnation universelle du terrorisme, entravant la défense des droits humains et le libre débat démocratique.]}}{Je salue votre conférence dont la nécessité s’impose depuis longtemps. Le crime ignoble perpétré en terre espagnole le confirme sans ambiguïté. Pourquoi? Je vais essayer d’exposer sous forme de thèses comment je vois l’Europe d’aujourd’hui. -La quasi-totalité de l’Europe, à un degré différent selon les pays, est en proie à la montée de l’antisémitisme. -Dans ce contexte, pointe une opinion selon laquelle Israël et les USA seraient des Etats terroristes. -Selon un sondage de l’UE, pour la majorité des Européens, Israël est la principale menace pour la paix. -On dénie à Israël le droit de se défendre et, qui plus est, celui d’exister. Le fait qu’Israël riposte à chaque acte terroriste est un sujet suscitant un agacement particulier chez les médias et, dans la foulée, dans l’opinion publique. -Les médias omettent de dire que le shahidisme qui a emporté des centaines de vies israéliennes, américaines et autres n’a pas été engendré par Israël. On veut ignorer que le shahidisme est une maladie infectieuse, qui se propage comme la peste dans le monde entier. -Les shahids sont les victimes silencieuses des dirigeants des organisations terroristes palestiniennes et de leurs soi-disant leaders “spirituels”. Ceux-ci envoient à la mort des centaines de jeunes gens, presque des enfants, qu’ils manipulent. Ils devraient être jugés pour cela. S’ils ne peuvent l’être, alors ils doivent être supprimés pour ces crimes relevant de la contrainte au suicide. Le caractère de masse de ces crimes dirigés essentiellement contre les civils les apparente aux crimes contre l’humanité. Tout cela est évident, mais des millions d’individus, tant en Europe qu’aux USA, semblent avoir perdu toute capacité à appréhender la réalité. D’où ce phénomène nouveau, étrange et effarant: le refus de résistance, le shahidisme spirituel suicidaire chez les Européens. L’Espagne en est une illustration éloquente. Bouleversée par les évènements du 11 mars, elle a décidé de retirer ses soldats d’Irak. Par cet acte, c’est comme si elle préparait psychologiquement l’Europe à la décision suicidaire de ne pas s’opposer au terrorisme. La perte de la perception du danger, l’espoir erroné de la communauté européenne et de ses leaders intellectuels et politiques que la situation pourra se régler sans que l’Europe soit touchée, voilà qui alimente la poussée de l’antisémitisme. C’est sur cette approche que se fonde le soutien inconditionnel apporté aux Palestiniens et à Arafat, malgré la terreur incessante pratiquée par le Hamas, le Fatah, les Martyrs d’Al-Aksa et d’autres. L’Europe semble avoir été contaminée par une maladie inhérente à la Russie: se prendre toujours le même râteau dans la figure. Elle a oublié les mots proférés par Chamberlain en 1938, à son retour de Munich après sa rencontre avec le Furher, dont il serait bon que se souviennent ceux qui les ont entendus et que devraient apprendre les trois générations qui ont suivi : “Je vous apporte la paix” . Ces mots sur la PAIX ont marqué le début de la seconde guerre mondiale. A présent, la troisième est en cours. Le 11 septembre 2001, un défi a été jeté aux USA et à l’Europe. Les USA et la coalition l’ont relevé, ils ont été contraints à la guerre. La destruction d’Al Qaeda et 1a liquidation du régime de Saddam sont devenues des conditions nécessaires pour préserver les peuples afghan et irakien, ainsi que la civilisation dans 1aquelle nous vivons, nous, européens et américains, et qui porte, de plein droit, le nom de civilisation européenne. Quelles que soient les erreurs commises pendant la guerre d’Irak et dont le nombre croît de façon critique depuis le début de cette année, la nécessité historique de ces guerres ne peut être mise en cause. Nous serons tous, des deux côtés de l’Atlantique, menacés d’un danger mortel, tant que l’Europe n’aura pas surmonté son négativisme vis à vis des USA et d’Israël. Une guerre est toujours terrifiante. Elle détruit de l’intérieur n’importe quelle armée, même celle qui mène une guerre juste. Une société démocratique est en droit d’exiger de ses dirigeants et de ses forces armées de tout mettre en œuvre pour épargner au maximum les civils sur les territoires où se déroulent les combats. D’exiger que les vaincus, les prisonniers et les blessés soient traités avec humanité et en conformité avec les conventions internationales. Toute violation de ces principes doit être condamnée et les coupables punis. C’est exactement à quoi s’emploient aujourd’hui les USA et la Grande Bretagne} {11 mai 2004 Elena Bonner}