Tant de choses fortes ont été dites lors de cette Conférence que nous avons décidé de publier des extraits des principales interventions plutôt que de les résumer simplement. L’exposé de François Zimeray, qui a accepté d’être notre Président d’Honneur, a dégagé le sens profond de notre combat, tandis que Jacky Mamou et Ghislaine Doucet se sont attachés à définir plus précisément le rôle des ONG face au terrorisme. Nous avions convié très largement personnalités, associations démocratiques et humanitaires. Si nous avons regretté l’absence de réponse des plus grandes organisations, d’autres avaient répondu présentes et nous nous en félicitons. Dans la salle on notait la présence de plusieurs personnalités, universitaires, militants attachés à la paix et aux droits de l’homme et cela aussi est très important. Des liens se sont noués entre différentes générations de militants, depuis des survivants de la Shoah jusqu’à de jeunes militants associatifs engagés dans le combat humanitaire d’aujourd’hui. Au-delà du symbole, c’est la preuve que notre combat prend corps. Faute de temps, tous ceux qui le souhaitaient n’ont malheureusement pas pu prendre la parole et tous les messages n’ont pu être lus. Mais la soirée a tout de même permis à des positions très diverses de s’exprimer. Attachés au libre débat démocratique nous avons essayé de les rapporter fidèlement, même si nous ne les partageons pas toutes. Car ce qui unit les participants à cette Conférence, la volonté farouche, pour reprendre les termes de Jacky Mamou, de « casser tout soutien moral au terrorisme », est bien plus fort que ce qui les sépare. Désormais elle les soude, elle nous soude pour affermir un combat dont les récents événements ont confirmé l’urgence. Interventions de Jacky Mamou, ancien Président de Médecins du Monde et d’Eric Ghozlan, Psychologue ClinicienExtraits de la présentation par Eric Ghozlan du Rapport de Médecins du Monde de juillet 2003 : « Les civils israéliens victimes des attaques des groupes armés palestiniens » (Mission d’enquête Médecins du Monde- Israël – août 2002) Le rapport intégral peut être consulté sur le site de MDM Ce rapport rendu public en juillet 2003 est le deuxième volet d’un Rapport en deux parties intitulé : « Les civils israéliens et palestiniens victimes d’un conflit sans fin ». Un premier rapport, réalisé à partir d’une enquête menée avec la FIDH en mai 2002 à Naplouse et publié en juillet 2002, concluait à des violations du droit international humanitaire pendant l’opération « Mur de Protection ». La FIDH a refusé de participer à la 2° enquête. Nous avons eu beaucoup de mal à réunir des données en août 2002. Les Israéliens pris dans la tourmente des attentats n’avaient pas de statistiques. Les chiffres établis en recoupant les informations de diverses sources, officielles, hospitalières et d’ONG comme B’Selem sont clairs : le nombre de victimes d’attentats (blessés et morts) est passé de 301 en 2000 à 2011 en 2002. ( Chiffres valables au 18 juillet 2002). La répartition géographique des attentats montre que Jérusalem, ville très ancienne et très peuplée, est la plus frappée (49 attentats au 1° semestre 2002). Le centre hospitalier du centre de Jérusalem est « sur la ligne de front » et le service des urgences a dû être agrandi. La proportion de victimes civiles est de 71 % pour l’ensemble et de 83% à Jérusalem. Les enfants de 0 à 10 ans représentent 4 % des victimes, les enfants et jeunes de 11 à 20 ans 21%, les personnes de plus de 60 ans, 16 %. Les femmes représentent 51% des civils tués à l’intérieur d’Israël. Le principe de distinction entre objectifs militaires et populations civiles n’étant pas respecté par les groupes armés palestiniens, les attaques contre les civils israéliens représentent un crime de guerre. Les attentats « démocides » : néologisme inventé pour désigner les attentats suicides. Nous récusons le terme de « kamikaze » qui fait référence à une action visant une cible militaire et met l’accent sur l’assaillant et non la victime. Ils constituent des crimes contre l’humanité car -systématiques -très fréquents -ciblant les civils -commis dans des lieux publics très fréquentés -cherchant à provoquer un maximum de dégâts par l’usage d’explosifs et d’agents vulnérants dans le but d’infliger des souffrances maximales aux survivants -leur mode opératoire diffère des autres formes d’attaques terroristes ou militaires. La personne du terroriste est réduite à sa dimension physique, son corps servant de projectile. Ce type d’attentat tend à se propager dans le monde. Nous avons recueilli les témoignages de plusieurs victimes. L’onde de choc a un pouvoir lésionnel extrêmement important et elle est démultipliée en milieu fermé. Les victimes aux membres arrachés ne survivent jamais. L’adjonction d’objets métalliques crée des lésions supplémentaires. Itzak, 57 ans, électricien : « J’ai encore un boulon dans le thorax. Ils ne veulent pas me l’enlever. Moi, je ne veux pas le garder en moi. » Des victimes doivent garder dans le corps boulons ou bouts d’os étranger, le risque opératoire pour les extraire étant trop grand. Il y a l’effet déstructurant du corps-bombe, l’horreur du bout de corps qui touche une victime. Le traumatisme psychique entraîne une névrose traumatique avec asthénie, troubles du sommeil, cauchemars à répétition, comportements phobiques, troubles de la mémoire, chez l’enfant attitude régressive et troubles caractériels. Je citerai le message d’un enfant victime exprimé sur un dessin : « Jusqu’à quand ? Assez !! »